DEGRADATION DE LA NATURE- Sécheresse de tous les dangers pour les kangourous et émeus d’Australie
Bébés kangourous abandonnés par leur mère, wallabies rendus aveugles par le soleil, koalas contraints à des marathons pour se nourrir : les animaux sauvages emblématiques de l’Australie paient un lourd tribut à la sécheresse qui assoiffe l’immense île-continent.
Le manque d’eau, qui perdure depuis plusieurs années dans certaines régions, grille les récoltes et contraint certains éleveurs à abattre leur bétail faute de pouvoir l’alimenter.
La sécheresse aggrave aussi les conditions de vie des espèces endémiques pourtant plus résistantes que le cheptel.
« Un grand nombre de kangourous meurent dans tout le pays », explique à l’AFP Richard Kingsford, professeur d’écologie à l’Université de Nouvelle-Galles-du-Sud, soulignant que les changements sont si rapides que de nombreux « animaux et plantes n’ont pas le temps de s’adapter ».
Les autorités ont augmenté leurs aides aux agriculteurs plongés dans de graves difficultés financières. Mais pour les scientifiques, il faut soutenir parallèlement la faune et la flore sauvages, lesquelles sont aussi confrontées à l’activité humaine, à la concurrence d’espèces invasives et à la réduction de leur habitat.
Aplatis sur la route
Racheal Walker, qui travaille pour Wires, association de volontaires spécialisée dans le sauvetage d’animaux sauvages, a constaté une nette augmentation du nombre de bébés kangourous secourus dans le centre-ouest de l’État oriental de Nouvelle-Galles-du-Sud.
Les bébés malnutris sont abandonnés par leur mère qui ne peut plus les alimenter, d’autres sont des orphelins dont les parents ont été fauchés par des voitures en s’approchant des villes pour trouver eau et nourriture.
Elle a également remarqué que les marsupiaux plus petits, qui d’ordinaire préfèrent les zones boisées, vont bien plus loin pour manger.
« On trouve beaucoup plus de wallabies aveugles, car ils s’aventurent à découvert dans les champs pour chercher leur nourriture, et leurs yeux sont incapables de faire face au grand soleil », dit-elle à l’AFP.
Les koalas parcourent de plus grandes distances à mesure que les eucalyptus dont ils se nourrissent se dessèchent, ce qui les expose aux attaques de chiens et aux accidents de voiture.
Les échidnés à nez court, petits mammifères qui ressemblent à des hérissons et se nourrissent des insectes attrapés avec leur langue collante, se font aplatir sur les routes pendant la saison des amours.
Depuis 2016, Wires a relevé une augmentation de 52 % du nombre de macropodes secourus (marsupiaux de la famille des kangourous), un chiffre qui bondit à 81 % s’agissant des wombats. Ces taux pourraient être bien plus élevés dans l’arrière-pays inhabité, ajoute Mme Walker.
« Touffes de verdure »
Dans le nord-ouest de la Nouvelle-Galles-du-Sud, les populations de kangourous se sont effondrées de plus de 90 %, explique le professeur Kingsford.
La sécheresse exacerbe les conflits d’intérêts entre animaux sauvages et agriculteurs qui tentent désespérément de préserver chaque brin d’herbe pour leurs troupeaux.
À Booligal, où la pluviométrie est inférieure cette année de 75 % à la moyenne, les agriculteurs Matt et Sandra Ireson ont constaté une augmentation du nombre de kangourous et d’émeus aux abords des routes. Ils cherchent les « touffes de verdure » qui apparaissent à la faveur des rares averses, quand l’eau recueillie par le tarmac ruisselle sur les bordures des routes.
En conséquence, le nombre de collisions entre les véhicules et les bêtes sauvages a bondi de 20 % ces trois dernières années, selon le secteur des assurances. Si bien que Sandra Ireson a commencé à donner aux jeunes agriculteurs des cours de conduite « spécial sécheresse ».
Les plus grandes espèces de kangourous peuvent faire deux mètres de haut et peser 90 kilogrammes. Les collisions causent de sérieux dégâts aux voitures et aux conducteurs.
« Les gens ne veulent pas faire de mal aux animaux, ce qui se comprend, mais il faut apprendre à ne pas faire d’embardée, à simplement freiner », explique Mme Ireson.
Troupes d’émeus
Ces cours de conduite entrent dans le cadre des efforts pour attirer davantage de jeunes dans le bush, l’arrière-pays australien.
Les scientifiques préviennent que les sécheresses et vagues de chaleur vont s’aggraver avec le changement climatique. Les Australiens devront s’habituer au manque d’eau, mais aussi à voir la faune de près.
Pour Alison McLean, une agricultrice qui dirige « The Long Paddock », un projet touristique destiné à inciter les gens à visiter la région, la cohabitation entre animaux sauvages et êtres humains ne doit pas forcément mal se passer.
« Ils se rapprochent, ce qui donne l’occasion aux gens de les voir, tant qu’ils sont prudents au volant », dit-elle à l’AFP.
« C’est assez fou de voir des troupes de 30 émeus passer devant son nez. Cela se produit régulièrement, mais on s’arrête toujours pour prendre des photos ». Elle ajoute que deux échidnés habitent désormais dans sa cour.
Il ne semble pas prêt de pleuvoir et le professeur Kingsford espère que les autorités prendront des mesures pour protéger les espèces vulnérables, comme par exemple empêcher le bétail d’aller dans les parcs nationaux afin que les animaux sauvages puissent y trouver leur nourriture.
« Il y a un débat sur les difficiles conditions de vie des agriculteurs, ce qui est normal, mais les gens doivent aussi prendre conscience que l’environnement naturel souffre aussi en période de sécheresse », juge-t-il.
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POLLUTION EN INDE
Les vendeurs de feux d’artifice fulminent à Delhi ph2
Des vendeurs de feux d’artifice de la capitale indienne New Delhi en Inde ont fermé mardi dernier leurs magasins pour protester contre un jugement n’autorisant que des « pétards propres » pour les festivités de Diwali, dans le but de limiter l’exécrable pollution de l’air.
Les Indiens font habituellement sauter des millions de feux d’artifice pour Diwali, la grande fête des lumières hindoue qui tombe cette année le 7 novembre, et cela aggrave encore la pollution qui afflige à cette période de l’année le nord de ce pays de 1,25 milliard d’habitants.
Des dizaines de commerçants ont dénoncé comme « fantaisiste » une récente décision de la Cour suprême de n’autoriser la vente dans l’agglomération de Delhi que de pétards « verts », censés polluer nettement moins que les pétards normaux.
Or, « des pétards verts, ça n’existe pas en Inde. Je suis dans ce métier depuis 35 ans et je n’en ai jamais entendu parler ni vu ce produit », a déclaré à l’AFP Rajesh Tyagi, un négociant de pétards. Dans la vieille ville, des commerçants étaient assis devant leurs boutiques fermées, normalement très fréquentées en cette période festive.
Selon un article du quotidien Hindustan Times, un prototype de feux d’artifice moins polluant est en cours de développement dans le pays et pourrait arriver sur le marché l’année prochaine.
En 2017, la Cour suprême avait complètement interdit les pétards pour Diwali dans la capitale, invoquant les mêmes raisons environnementales. Cette mesure n’avait pas toujours été suivie d’effet.
La plus haute instance judiciaire d’Inde a en outre restreint l’usage des pétards entre 20 h et 22 h dans tout le pays pour ce Diwali.
Toux grasse, yeux qui piquent, mal au cœur : comme chaque année, Delhi et ses 20 millions d’habitants suffoquent actuellement dans un brouillard de pollution.
Ce phénomène est dû à une conjonction de causes naturelles (poussière, baisse des températures, changement des vents…) et liées à l’activité humaine (brûlis agricoles, émissions industrielles et de véhicules, incinération de déchets…). L’exposition à long terme à la pollution fait courir de graves dangers pour la santé publique.
Cet épisode d’air vicié est amené à empirer au cours des dix prochains jours, selon les prévisions.
À midi (2 h 30 HE) mardi dernier, l’ambassade américaine à New Delhi enregistrait une concentration de particules fines (PM2,5) de 410 microgrammes par mètre cube d’air. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande de ne pas dépasser 25 en moyenne journalière.