Économie

BCE : La pause avant les vacances

Alors que la Banque centrale européenne s’apprête à tenir sa réunion jeudi, l’institution de Francfort devrait marquer une pause dans son cycle d’assouplissement monétaire entamé il y a plusieurs mois. Après huit baisses consécutives de ses taux, la BCE devrait maintenir son principal taux directeur à 2%, sur fond d’incertitudes croissantes liées aux intentions protectionnistes de Washington. La menace d’une hausse des droits de douane américains sur les importations européennes, dont le niveau définitif pourrait être fixé d’ici au 1er août, complique la lecture économique et pousse les responsables monétaires à temporiser. L’administration Trump menace d’imposer des tarifs douaniers allant jusqu’à 30%, soit bien plus que les 20% anticipés dans les scénarios les plus pessimistes de la BCE. Christine Lagarde devrait donc se montrer prudente dans son discours et éviter toute lecture politique. L’éventualité de tarifs élevés oblige néanmoins la BCE à revoir ses prévisions internes. Néanmoins, la mise à jour des prévisions officielles n’aura lieu qu’en septembre (une fois par trimestre). Bien que les marchés excluent une nouvelle baisse de taux dès cette semaine, ils anticipent encore un assouplissement monétaire supplémentaire entre septembre et décembre, avec une probabilité avoisinant les 50%. Tout dépendra de l’ampleur des droits de douane finalement appliqués. Or, plus les droits de douane seront élevés, plus la pression désinflationniste sera forte. D’une part parce que ce sera négatif pour la croissance. D’autre part, parce que si le marché américain se ferme davantage aux produits chinois, c’est en grande partie l’Europe qui absorbera les surcapacités chinoises. Plus d’offre qui, mécaniquement, tire les prix à la baisse.

Le risque d’ »undershooting » — une inflation inférieure à la cible — est donc bien réel. Les projections de juin tablaient déjà sur un taux d’inflation de 1,4% début 2026, loin de l’objectif officiel de 2%. Un scénario de droits de douane à 20%, associé à des mesures de rétorsion européennes, pourrait même faire replonger l’inflation sous les 2% en 2027. Néanmoins, le ralentissement de l’inflation reste un point de friction au sein de la BCE. Si certains responsables, comme Fabio Panetta, plaident pour un assouplissement renforcé en cas de tensions commerciales prolongées, d’autres, comme Isabel Schnabel, préfèrent maintenir le cap et laisser les taux inchangés pour l’instant. En parallèle, les plans de relance budgétaire massifs annoncés par l’Allemagne pourraient contribuer à soutenir l’inflation à moyen terme. Autre sujet de préoccupation pour la BCE : l’euro, qui s’est nettement apprécié face au dollar ces derniers mois. Depuis février, la monnaie unique a bondi de 17%, atteignant brièvement le seuil des 1,18, son plus haut niveau depuis 2021. Luis de Guindos, vice-président de la BCE, a lui-même identifié au début du mois le seuil des 1.20 comme un point de vigilance. Rappelons que la hausse de l’euro est désinflationniste, puisqu’elle réduit le coût des importations. Pour Morgan Stanley, l’euro pourrait grimper à 1,25 dollar d’ici 2027, réduisant l’inflation de 0,3 point à 1,7%, et empêchant la BCE d’atteindre sa cible. L’incertitude devrait donc conduire la BCE à temporiser. D’autant que les données d’activité ne s’effondrent pas. La dernière édition du Bank lending survey (enquête sur les conditions de crédit menée par la BCE) publiée mardi matin montre qu’il y a toujours un peu d’appétit pour le crédit, signe que l’activité reste résiliente.

 

 

 

 

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